Alfred Jarry
Alfred ou le grand « Jarryvari »
Alfred Jarry naît en septembre 1873 à Laval dans la Mayenne avant d’aller vivre avec sa mère à Rennes.
Le 1er septembre 1888 c’est la rentrée des classes. Son professeur de physique se nomme Felix Hébert ; il est en fin de carrière, prétentieux, bête, méchant, lâche, grossier avec un physique disgracieux. Ses cours sont de vastes chahuts organisés et les élèves le surnomme le Père Ebé. C’est une révélation pour Alfred qui invente une strophe : « Hourra ! Cornes au cul, vive le père Ubu. »
En octobre 1891 il obtint son bac, mention bien. Il suit à Paris le cours de rhétorique supérieure au lycée Henri IV avec Henri Bergson professeur de philosophie dont il dévore toutes les leçons. Pourtant, il échoue trois fois au concours d’entrée de l’Ecole normale supérieure et rate par deux fois sa licence de lettre. En parallèle de ses études, il écrit beaucoup ; une littérature truculente, pleine de personnages invraisemblables.
Il veut faire découvrir le père Ubu à ses amis ; ainsi, à son domicile du boulevard Port-Royal, il organise quelques petites représentations d’Ubu roi et d’Ubu cocu qui enthousiasment les potaches parisiens. Encouragé, il organise sur une scène officielle, le Théâtre de l’œuvre, une représentation le soir du 10 décembre 1896.
Le personnage Ubu est avare, vulgaire, scatologique, menteur, peureux, méchant ; obèse, il tape sur sa panse qu’il appelle « gidouille ». Il éructe des « Jambedieu », des « Cornegidouille » et déclare de tendres réparties à sa femme :
« Mère Ubu tu es bien laide aujourd’hui. Est-ce parce que nous avons du monde ? »
Le soir de la première, l’acteur qui incarne le Père Ubu est le grand Firmin Gémier ; vêtu d’un nez en trompe d’éléphant, il entre sur scène et lance : « Mer…dre ! »
L'image d'Ubu est une gravure sur bois d'Alfred Jarry en 1896
Cris de colère et d’indignation ou fou rires, la pièce se transforme en un vaste chahut où les gens s’invectivent sans comprendre qu’ils ont affaire à une habile critique de la société. Le critique célèbre Catulle Mendès s’adresse à Alfred Jarry :
« Le Père Ubu existe, vous ne vous en débarrasserez pas. Il vous hantera, vous obligera sans trêve à vous souvenir qu’il fut, qui il est. »
Un avertissement prémonitoire car petit à petit Jarry va s’identifier à Ubu. Il se transforme, grossit, il parle comme Ubu. Il devient le bouffon de service, il dit « nous » en parlant de lui. L’artiste abuse de l’absinthe et clame :
« L’eau est un liquide si impur qu’une seule goutte suffit à troubler l’absinthe. »
Il devient avide de sensations nouvelles et risquées en faisant avec son vélo de sport des courses en bord de Seine ou le long des voies de chemin de fer pour dépasser les trains. Il porte des vêtements féminins sous prétexte que le linge masculin nuit à l’aisance des gestes. Autre manie étrange et dangereuse, il porte un révolver dans sa « poche à cul » et tire sur des gens sans les toucher. Pour aborder une dame, il tire dans un miroir puis déclare :
« Madame, maintenant que la glace est rompue, nous pouvons causer. » Il continue pourtant d’écrire des pièces pour Ubu et crée la Pataphysique « Société de Recherches Savantes et Inutiles » qui lui survivra en 1948 par un cercle d’artistes et d’intellectuels. En 1907 son état de santé se dégrade et le 1er novembre, il meurt d’épuisement d’alcool et de privations.
L’adjectif ubuesque sera créé et le Père Ubu sera célébré en littérature, joué au théâtre et à la télévision, dessiné par Picasso et il donnera son nom à un groupe de rock américain et à un hebdomadaire satirique Belge paraissant le jeudi ! Salut l’artiste !
24 septembre 2022
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