Croisade anti... alcoolique

Buvez plutôt du vin de France !

Article paru dans la presse le 10 janvier 1902

" C’est avec un sentiment de fierté véritable que nous avons entendu, à l’assemblée générale de la ligue antialcoolique du Loiret, le rapport du docteur Fauchon qui montre les résultats obtenus. Aucun obstacle n’a arrêté son initiative tenace ; son champ de bataille : l’école, la caserne, l’atelier. A vrai dire, il a trouvé partout de puissants auxiliaires. Des conférences ont été tenues aux divers régiments et surtout le 131e à Orléans. Le régiment tout entier, réunis dans la salle du manège, a, à trois reprises, appris d’hommes autorisés les ravages pathologiques de l’alcool dans l’organisme, les troubles mentaux amenés par le terrible poison, ainsi que l’influence pernicieuse de celui-ci sur la famille. Les résultats ne se sont pas fait attendre. Après les manœuvres, un capitaine d’infanterie écrivait au docteur Fauchon :
- J’ai fait distribuer aux soldats vos brochures. Et pas un homme de ma compagnie, pendant les manœuvres, n’a bu de l’eau-de-vie et des apéritifs. Ils n’avaient absorbé que du vin et de la bière. C’est la première fois que je vois cela. Merci.
Il a été plus difficile d’atteindre l’atelier. Mais la Ligue que rien n’arrête, songe à l’affichage public et à l’impression de maximes antialcooliques sur le verso des billets de tramways. Quand verrons-nous se réaliser partout le rêve du docteur Fauchon : 
- l’ouvrier français du XXe siècle portant à ses lèvres une coupe où rutile le pur vin de France, tandis que d’un geste dédaigneux il repousserait la bouteille d’alcool ? "

Etonnant non ! Et pourtant !
Je possède le mémoire de fin d’études d’un étudiant de l’Institut d’Etudes politique de Lyon 1999/2000 :
" Parler et faire parler du vin : Les almanachs des amis de Guignols, 1922-1939 "

GnafEt je peux confirmer même si c’est à peine croyable, l’opinion qui prévalait, il y a quelques décennies, chez les gens et le corps médical concernant le vin et ses ‘’vertus’’... N’oublions pas ce que déclarait Pasteur en 1866 :

Le vin peut être considéré, à bon droit, comme la plus saine et la plus hygiénique des boissons.

Et comme de bien s’accorde, lorsque le médecin demande à Gnafron s’il ‘’boit’’, celui-ci répond naturellement :

-  Non ! Docteur, je ne bois pas des alcools, seulement du vin.

À la décharge de tous ces braves gens, précisons qu’à cette époque où le traitement de l’eau était quasi inexistant dans les villes comme à la campagne, l’eau était le vecteur de maladies contagieuses graves voire mortelles comme la typhoïde par exemple.

QuinaSi le vin ou la bière était de consommation courante, il y avait un vrai problème avec les boissons à base d’alcool comme l’absinthe, les eaux-de-vie et le pastis qui étaient souvent trafiqués. Leur absorption à forte dose provoquait rapidement des séquelles irréversibles et mortelles. Le vin comme la bière sans ajout d’alcool faisait plutôt figure de « fortifiant ». Ne donnait-on pas aux enfants chétifs ou malades du ‘’quina’’ pour les requinquer.

Le quinquina est une écorce provenant d'un arbre d'Amérique du sud. Il a des propriétés toniques, apéritives et fébrifuges. Le dictionnaire médical Larousse de 1912 donne une recette de vin au quinquina en recommandant d’en prendre un ou deux verres par jour, une demi-heure avant le repas.

AroudLe vin de quinquina est présenté comme un fortifiant et peut être consommé à tous les âges. Certains fabricants ajoutaient à leurs produits des ‘’extraits de viande’’ pour en renforcer les qualités tonifiantes.
Les enfants, qui, à l'époque, peuvent souffrir d'anémie ou avoir des problèmes de santé, font donc partie des consommateurs ciblés. On le voit dans cette publicité pour le vin Aroud, fabriqué en laboratoire.

Eugène Ogé, célèbre affichiste, aligne des têtes réjouies dans un bandeau pour Dubonnet :
Dans une bonne humeur générale, la nourrice tend un verre de Dubonnet aux bambins sous sa garde pendant que le grand frère se régale. Le jeune couple flirte et les deux vieillards trinquent en souriant.

Et toujours, cliquez sur les photos ; plus grandes, elles sont plus belles, nettes et détaillées.

Dubonnet