Accusée Renée Saint-Cyr
Réquisitoire du 6 avril 1981
Renée Saint-Cyr, née le 16 novembre 1904 est morte le 11 juillet 2004. Elle est la mère du réalisateur Georges Lautner (1926-2013. C’est une actrice française qui au moment du Réquisitoire de Pierre Desproges était au générique du film « Est-ce bien raisonnable ? » réalisé par Georges Lautner, scénario de Michel Audiard, avec Miou-Miou, Lanvin et Galabru.
Françaises, Français,
Belges, Belges,
Troublant et pulpeux ténor du barreau,
Chère Liane de Moitié,
Mesdames et messieurs les jurés,
Public chéri, mon amour.
Donc, Renée Saint-cyr est coupable. Je pense que ce serait une bonne idée de lui couper la tête, j’aime mieux commencer par la fin. En effet, il arrive souvent que mes réquisitoires débouchent sur des thèmes philosophiques d’une bouleversante intensité au point qu’arrivé à la fin j’oublie le début, et ne sachant plus qui nous jugeons, j’oublie aussi de réclamer sa tête, ce qui est épouvantable. En effet, dans quel abîme de laxisme, la justice d’exception sombrerait-elle si nous nous mettions à ne plus condamner à mort les innocents par pure étourderie ? Donc, Renée Saint-Cyr, couic. !
Qu’il me soit permis, madame, de revenir sur une déclaration que vous avez faite à l’instruction à propos de Napoléons 1er. Je vous cite : « J’ai toujours été passionnément amoureuse de l’empereur Napoléon. Petite, je collectionnais ses photos, les serrais sur mon cœur ou les disposais sur ma table entourées de fleurs et de bougies ». Nous sommes mesdames et messieurs les jurés, en présence d’un cas de fétichisme impérial compliqué d’une pathologie obsessionnelle du candélabre. Napoléon 1er exerce encore sur des gens calmes et normaux comme vous un fascination extraordinaire, alors qu’on oublie ses émules contemporains.
Je pense notamment à sa majesté Bokassa 1er pour lequel les bonapartistes ne montrent qu’une ferveur mitigée. Pourtant sa majesté Bokassa 1er n’a-t-il pas copié l’empereur avec son sacre qui rappelle celui de Napoléon peint par David chef incontesté de l’école néo-classique et roi des lèche-culs impériaux. Même faste pompeux, même parterre de ministres serviles et de diplomates courbés, même déguisement grotesque, casquette métallique et moquette 100% acrylique.
On remarquera toutefois le règne moins long de Bokassa que celui de Napoléon. Ce qui ne l’a pas empêché de faire massacrer autant de gens que le second. D’autre part Napoléon a inventé la légion d’honneur alors que Bokassa ne laissera à la postérité que quelques recettes de cuisine dont le lieutenant-colonel Melba et le chef de cabinet sauce gribiche.
Vous allez me dire, monsieur le président : « On ne peut pas comparer Napoléon à Bokassa parce que Bokassa c’est un nègre ». Permettez-moi d’être choqué par cette réflexion venant d’un homme comme vous, nul, certes, mais bon chaleureux, généreux et tolérant. Vous m’auriez dit : « On ne peut pas comparer Napoléon à Bokassa parce que Napoléon c’est un Corse »
Là je dis bon, d’accord et je m’écrase, car le mot « Corse » n’est pas péjoratif.
De même qu’on ne dit pas aujourd’hui un non-voyant pour ne pas choquer la sensibilité des aveugles, ou une non-bandante pour ne pas choquer la susceptibilité des boudins ; on devrait donc créer un néologisme pour ne pas choquer la susceptibilité des Corses. On pourrait dire les « non-bossants », par exemple. C’est une simple question de délicatesse.
Ainsi moi qui vous parle, j’ai un beau-frère nain, cul-de-jatte, manchot, sourd-muet, con et pacifiste. Pour égayer sa vie, il suffirait que nous l’appelions : le non-grandissant, non gambadant, non-embrassant, non-entendant, non jactant, non comprenant et non-violent.
Tout cela, répétons-le est affaire de délicatesse. On ne dit plus un infirme, on dit un handicapé, on ne dit plus un vieux, on dit une personne du troisième âge. Pourquoi alors dire un jeune plutôt qu’une personne du premier âge. Ces beaux messieurs les bureaucrates ont inventé ces merveilleux néologismes. Ne vivons-nous pas au siècle de l’hypocrisie suprême ?
De plus en plus de vieux meurent recroquevillés dans leur mansarde avec le crucifix sur le ventre et le squelette du chat à côté, ou ils moisissent dans des mouroirs provinciaux dans l'indifférence générale. Il n’y a plus de pauvre vieux, mais de joyeux troixième-âgistes, il n’y a plus de pauvres affamés sous-développés, mais de sémillants affamés en voie de développement.
Françaises, Français réjouissons-nous, nous vivons dans un siècle qui a résolu tous les vrais problèmes en appelant un chat un chien.
Donc Bokassa est aussi peu corse que Napoléon fut nègre. Mais sommes-nous sûr de la non-négritude de Napoléon ? Réfléchissons : ce qui différencie un Noir d’un Blanc à part la couleur de la peau et l’intelligence qui n’est pas la même chez Denise Fabre et Léopold Sédar Senghor ?
La grande différence, c’est la morphologie génitale dont les meilleurs spécialistes s’accordent à affirmer qu’elle joue nettement en faveur du Noir en ce qui concerne les mensurations.
Bien, je n’affirme pas que Napoléon soit un nègre. Simplement je pose la question : « A votre avis, qu’est-ce qu’il chatouillait du matin au soir sous son gilet ? »
Nota benêt – Renée Saint-Cyr : cette comédienne a tourné dans tellement de films avant, pendant et après la dernière guerre qu’on renonce à les citer. Si un : Les Deux Orphelines (son premier grand succès de 1933). Elle a failli jouer les deux tellement elles se ressemblaient.
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