Le petit Poisson et le Pêcheur
Livre 5 - Fable
Ésope (VIIe - VIe siecle av.J.C.) avait écrit une fable mettant en avant la sagesse populaire face à une tentative de manipulation du poisson, elle s'intitulait Le Pêcheur et le Picarel qui est un poisson commun vivant en mer Méditérranée très gouteux en friture ou dans la soupe de poissons. Titre logique pour notre fabuliste grec. En voici le récit ci-dessous
Un Pêcheur ayant pris un petit Poisson, dont le goût est très agréable, résolut de le manger. Ce petit animal, pour se tirer des mains du Pêcheur, lui représentait qu’il devait lui donner le temps de croître et le priait très instamment de le relâcher, lui promettant de revenir de son bon gré mordre à l’hameçon au bout de quelque temps. ” Il faudrait que j’eusse perdu l’esprit, lui répliqua le Pêcheur, si je me fiais à tes promesses et si sous l’espérance d’un bien futur et incertain, je me privais d’un bien présent et assuré. “
Vous l'aller voir tout à l'heure, notre fabuliste du XVIIe a repris cette petite histoire avec juste une mise en forme et le vocabulaire de son époque.

L'image de son récit (à gauche) est tout à fait classique.
Pour ma version (à droite), il m'apparut amusant d'être le pêcheur. Habitant alors à Vienne, de ma fenêtre la vue sur le Rhône et le parc du Pilat était une vraie douceur.
Il me fallait trouver un bord du Rhône.
Après de nombreuses recherches, j'ai retenu un paysage qui se situait vers Jonage où papa allait pêcher dans les lones du Rhône. Ensuite une jolie table avec son banc fut incrusté sur la gauche de l'image. Pour me mettre en scène, entre mon pantalon et mon visage un buste avec les gestes "ad hoc" d'un personnage permettaient de montrer le poisson que je rajoutais en bout du bras droit. Et sur la table il ne restait plus qu'à rajouter le "casse-croûte". Merci Photoshop !
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Version de La Fontaine
Petit poisson deviendra grand
Pourvu que Dieu lui prête vie.
Mais le lâcher en attendant,
Je tiens pour moi que c'est folie ;
Car de le rattraper il n'est pas trop certain.
Un Carpeau qui n'était encore que fretin
Fut pris par un Pêcheur au bord d'une rivière.
Tout fait nombre, dit l'homme en voyant son butin
Voilà commencement de chère et de festin :
Mettons-le en notre gibecière.
Le pauvre Carpillon lui fit en sa manière :
Que ferez-vous de moi ? je ne saurais fournir
Au plus qu'une demi-bouchée.
Laissez-moi Carpe devenir :
Je serai par vous repêchée.
Quelque gros Partisan m'achètera bien cher :
Au lieu qu'il vous en faut chercher
Peut-être encor cent de ma taille
Pour faire un plat.
Quel plat ?
Croyez-moi, rien qui vaille.
Rien qui vaille et bien soit, repartit le Pêcheur :
Poisson mon bel ami, qui faites le Prêcheur,
Vous irez dans la poêle ; et vous avez beau dire ;
Dès ce soir on vous fera frire.
Un Tiens vaut, ce dit-on,
Mieux que deux Tu l'auras
L'un est sûr, l'autre ne l'est pas.
Version de Fabulgone
Où La Fontaine affirme dans cette fable un peu sombre
Qu’il ne faut surtout pas lâcher la proie pour l’ombre.
Un poiscaille maigrichon serait devenu mastard,
Si le dabe d’en haut l’avait jugé bonnard
Oui mais manque de pot il était très poissard.
Je confirme en tout les cas qu’il faut être bredin,
Pour refoutre à la baille même un menu fretin,
Pensant qu’il grossirait et reviendrait demain.
Un carpeau riquiqui trempait dans une vase,
Frétillait de la queue et carburait plein gaz,
Quand il zieuta soudain un maous astibloche,
Il se dit illico, - Tiens je vais me taper la cloche !
C’est comme ça, ta pigé, qu’un pêcheur l’a gaulé.
La prise n’est pas lerche, mais faut pas chipoter,
Se dit bonhomme tout joice de n’pas rentrer bredouille
Faut bien pour ma bergère, un début de tambouille !
Le carpeau qui avait, tu t’en doutes, les foies,
Larmicha qu’il n’était qu’une petite proie,
Pas plus gras que les miches d’un mannequin à la mode.
Laisse-moi d’abord grossir avant qu’on m’accommode
Et quand tu reviendras dans deux ou trois semaines,
J’aurais alors crois moi pris un peu de bedaine !
Le pêcheur ricanant dit alors au poiscaille.
Tu me prends pour un cave si tu crois qu’à la baille
Je vais te rejeter pour que tu puisses grandir
Et dans mon filochon je n’vais pas te laisser languir
Car ce soir aussi sec, c’est dans la poêle à frire,
Qu’avec quelques amandes, gentiment tu vas cuire.
Un tiens vaut, nous dit-on, mieux que deux tu l’auras.
Et n’est-il pas gouteux ce poisson dans le plat ?
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