Le Grillon

Où Florian t'avertit :
« Cesse donc de faire la bobe, de toujours renauder
Sans jamais accepter ce que fit la Nature
Observe autour de toi, et sans désinvolture
Tu reconnaîtras que, c'n’est pas une enfoirée. »

Le Grillon

Image réalisée en juillet 2004 par Fabulgone, cliquez dessus pour bien la visualiser

Version de Florian

Un pauvre petit grillon   
Caché dans l’herbe fleurie   
Regardait un papillon   
Voltigeant dans la prairie.   
L’insecte ailé brillait des plus vives couleurs ;    
L’azur, le pourpre et l’or éclataient sur ses ailes ;    
Jeune, beau, petit-maître, il court de fleurs en fleurs
Prenant et quittant les plus belles. 
Ah ! Disait le grillon, que son sort et le mien  
Sont différents ! Dame nature  
Pour lui fit tout et pour moi rien.  
Je n’ai point de talent, encor moins de figure ;    
Nul ne prend garde à moi, l’on m’ignore ici-bas :   
Autant vaudrait n’exister pas  
Comme il parlait, dans la prairie  
Arrive une troupe d’enfants ;  
Aussitôt les voilà courants  
Après ce papillon dont ils ont tous envie. 
Chapeaux, mouchoirs, bonnets, servent à l’attraper. 
L’insecte vainement cherche à leur échapper,
Il devient bientôt leur conquête.  
L’un le saisit par l’aile, un autre par le corps ;   
Un troisième survient et le prend par la tête. 
Il ne fallait pas tant d’efforts  
Pour déchirer la pauvre bête.   
Oh ! Oh ! Dit le grillon, je ne suis plus fâché ;   
Il en coûte trop cher pour briller dans le monde.  
Combien je vais aimer ma retraite profonde !  
Pour vivre heureux vivons caché.

Version de Fabulgone

Un grillon tout mignard planqué sur une herbette,  
Près d’un coquelicot reluquait à la sauvette,  
Un papillon machaon aux ailes bleues et or,  
Butinant les bleuets et puis les boutons d’or.  
Dame nature est vacharde, grésillait l’ensifère  
Elle qui m’a créé bien plus noir que l’enfer.  
Machaon est aimé, tout le monde m’ignore.  
À quoi me sert de vivre, j’en appelle à la mort.  

Pendant qu’il rouscaillait, arrivent dans le pré  
Une paire de mioches qui s’mettent à courater  
Après le papillon qu’ils veulent arquepincer,  
Et qui en courant d’air, ne put se déguiser.    

Le garçon chopa une aile, la fillasse la queue.  
Ils cigognèrent  la tête, tuant le porte-queue.   
Les momignards caltèrent laissant tomber l’insecte  
Sans penser qu’ils avaient commis un crime abject   
Aux yeux de l’ensifère  encore tout brassouillé   
Et surpris de ce drame, de sa soudaineté.   
Le grillon gambergea que les stars du show-biz   
Adulées par leurs fans qui leur tapent la bise,   
Sont aussi poursuivies par des paparazzis   
Qui leur prennent la tête, leur pourrissent la vie.

L’issue bien sûr n’est pas toujours aussi fatale   
Que pour le papillon qui n’entrava que dalle    
Quand il partit rejoindre le squelette et sa faux.  
Anonyme, il aurait évité bien des maux !

Cette maxime crois-moi, il vaut mieux adopter :   
« Pour vivre heureux, vivons caché. »