Le Danseur de corde et le balancier

Où Florian aurait pu dire aux gens qui se moquent
Des règles de sécurité à bord de leur voiture
Refusant de boucler en roulant, leur ceinture
"Un petit clic vaut mieux, c'est sûr, qu'un grand choc"

Et toi gamin qui part faire un tour sur ta mob'
Ajuste sur ta citrouille ton casque, sans faire la bobe.

 

Version de Florian  

Sur la corde tendue un jeune voltigeur
apprenait à danser, et déjà son adresse
ses tours de force, de souplesse,
faisaient venir maint spectateurs. 

Sur son étroit chemin on le voit qui s'avance,
le balancier en main, l'air libre, le corps droit,
hardi, léger autant qu'adroit.
Il s'élève, descend, va, vient, plus haut s'élance,
retombe, remonte en cadence,
et, semblable à certains oiseaux   
qui rasent en volant la surface des eaux,   
son pied touche, sans qu'on le voie,
à la corde qui plie et dans l'air le renvoie. 

Notre jeune danseur, tout fier de son talent,   
dit un jour : à quoi bon ce balancier pesant     
qui me fatigue et m'embarasse ?
Si je dansais sans lui, j'aurais bien plus de grâce,
de force et de légèreté. 

Aussitôt fait que dit. Le balancier jeté,     
notre étourdi chancelle, étend les bras, et tombe.  
Il se cassa le nez, et tout le monde en rit.  

Jeunes gens, jeunes gens, ne vous a-t-on pas dit   
que sans règle et sans frein tôt ou tard on succombe
La vertu, la raison, les lois, l’autorité,   
dans vos désirs fougueux vous causent quelque peine   
c'est le balancier qui vous gêne, 
mais qui fait votre sûreté.

Version de Fabulgone

Tandis que des minots en bas écrasent leur bulle, 
Un jeune voltigeur lui, joue les funambules.
Sur une corde tendue, il s'exerce à danser
Et crois-moi à l'zyeuter, c'n'est pas un bras cassé.
Il crapahute sans peur tout le long du filin
D'une aisance naturelle, la souplesse d'un félin
Il sélève et descend, et plus haut il s'élance
Son balancier en pogne qui marque la cadence
Tout pareil à ce piaf qui rase-motte en volant
À la surface d'un lac ou bien de l'océan
Il effleure à peine la corde qui sous son poids
Se rapproche du sol puis dans l'air le renvoie
Il exécute alors une ultime pirouette
Sous les vivas des mômes qui lui font la fête
Tout fier de son talent, il en chope la grosse tête
Joue les stars du cinoche, dédaignant la recette
Qu'il enfourne pourtant au fin fond de ses fouilles.
Pourn'pas courir le risque de bouffer la grenouille
Il se prend un matin les boyaux du cerveau.
Dois-je vraiment, dit-il , quand je monte là-haut
Prendre ce balancier qui toujours m'embarasse
Si je dansais sans lui, j'aurais bien plus de grâce
Comme on jette sa gourme, il le jette aux orties
Puis grimpe sur le fil où il joue les affranchis.
Sur la corde il chancelle, se casse la margoulette
Il s'explose le pif, s'abouse comme une carpette
Sous les rires de la foule qui se paye sa poire
Alors qu'hier encore, elle le couvrait de gloire.
Jeunes de tous pays et de tous horizons
Qui croyez que sans règle, ni vertu, ni raison
Vous pouvez de plein gré, vivre libre et sans chaîne
Ne dites plus demain : " Ce balancier me gêne ! "