L'enfant et le miroir

Jean-Pierre de Claris de Florian était très attaché à l’éducation des enfants et leur sociabilisation.
Cette fable est totalement intemporelle en nous montrant que les enfants de son époque étaient comme ceux d’aujourd’hui.
Son apologue (instruction déguisée sous l'allégorie d'une action) nous montre ici une vérité universelle : le mal engendre le mal, alors que le bien favorise l’épanouissement de l’homme.
Il rappelle que la bonté est souvent traduite par un rayonnement de l’expression physionomique, notamment du regard. C’est pourquoi il met ici en scène un enfant, ses mimiques et un miroir. La mère par sa gentillesse symbolise l’éducation qui ne doit pas se borner à des sentences abruptes, mais qui doit être simple, imagée et pédagogique pour être comprise.
Une fable qui devrait figurer au programme des enfants des classes primaires.
Je précisee qu’au temps de Jules Ferry, les Fables de Florian étaient récitées par tous les écoliers de France.

Une fable toujours actuelle

Un enfant élevé dans un pauvre village
Revint chez ses parents, et fut surpris d’y voir
Un miroir. 
D'abord il aima son image
Et puis, par un travers bien digne d'un enfant,
Et même d'un être plus grand,
Il veut outrager ce qu'il aime, 
Lui fait une grimace, et le miroir la rend.
Alors son dépit est extrême 
Il lui montre un poing menaçant, 
Il se voit menacé de même. 
Notre marmot fâché s’en vient, en frémissant
Battre cette image insolente ; 
Il se fait mal aux mains. Sa colère en augmente 
Et, furieux, au désespoir, 
Le voilà devant ce miroir, 
Criant, pleurant, frappant la glace. 
Sa mère, qui survient, le console, l’embrasse, 
Tarit ses pleurs, et doucement lui dit :
N'as-tu pas commencé par faire la grimace 

À ce méchant enfant qui cause ton dépit ?
Oui ! Regarde à présent : tu souris, il sourit ; 
Tu tends vers lui les bras, il te les tend de même
Tu n'es plus en colère, il ne se fâche plus :  
De la société tu vois ici l'emblème ; 
Le bien, le mal, nous sont rendus..