La rencontre
La galante invention des papillottes
La papillotte, fait partie du patrimoine lyonnais, même si de nos jours, cette friandise de noël est connue aussi bien en France que dans le monde moderne. ? l’origine le mot papillotte avait deux t ce qui la différenciait des autres définitions de ce vocable et maintenant, la pauvre n’en a plus qu'un et elle se retrouve mélangée avec les autres définitions dans les dictionnaires. Nos belles papillottes lyonnaises ont disparues, la faute au progrès, pour devenir objet de grande consommation en France et ailleurs. Je vous propose donc d’aller à la découverte de son origine telle que Glaudius Mathevet la conta en 1933 aux Amis de Guignol. Une bien belle histoire, préparez vos mouchoirs.
Ah le bon gone que c’était le Pétrus Thomachot ! Dégourdi comme un singe et bien artet (adroit) et en même temps gentil comme un enfant de chœur. Son père, qui était rondier en Fabrique, c’est-à-dire canut, tisseur sur soie, avait voulu que son fils apprit le métier de pâtissier. Nous étions à l’époque de Louis-Philippe vers 1848 où les fabricants étaient tous en grande difficulté et donc le papa Thomachot plaça le Pétrus en apprentissage chez le Papillot, pâtissier en rue Mercière qu’on appelait à cette époque la grande rue Mercière car elle comprenait les plus beaux magasins de la presqu’île lyonnaise, libraires, imprimeurs, charcutiers et pâtissiers renommés, de quoi satisfaire le cerveau et l’estomac.
Le gone de 16 ans en était à ses trois premières semaines d’apprentissage, lorsqu’un jour, alors que sur les huit heures du matin, il allait porter des quenelles chez un gros fabriquant du quai de Saône, il rencontra une jolie petite fenotte. Comme elle avait un tablier noir et portait sous son bras un cahier et un livre, bien sûr qu’elle allait à l’école la beline. Même que c’était chez les sœurs Saint-Charles en rue du Plâtre.
? cette époque, nous n’étions pas sous les décrets de monsieur Jules Ferry et il n’y avait dans tout Lyon que treize écoles pour les garçons et douze écoles pour les filles ; elles étaient dirigées par les Frères d’instruction chrétienne ou les Sœurs Saint-Charles.
Le pétrus regarda la petite fenotte comme jamais de sa vie il n’avait regardé nul quiconque. C’est qu’elle était joliment canante la beline, avec son visage bien rond rose, son petit nez relevé comme ça se porte chez nous et qui semblait renifler tout benaise, les bonnes odeurs que s’en venaient de la cuisine de maître Papillot, ses yeux bleus grands ouverts qui regardaient bien franc devant eux et ses cheveux blonds comme de la pâte à biscuits et frisés comme de la belle chicorée.
Pour sûr, elle était bien canante la petite. Mais elle avait traversé l’allée et tout au bout tournait déjà en rue Mercière. Son image restait en tête du Pétrus qui s’en alla sur le quai, monta deux étages et remis sa casserole de quenelles à la bourgeoise du monsieur fabricant qui vint lui ouvrir elle-même rapport que sa bonne venait de descendre ses balayures sur le bas-port à cause, qu’en ce temps-là il n’y avait pas encore de seaux d’équevilles. La dame trouva le petit pâtissier bien gentil et lui donna un sou d’étrenne, vrai de vrai. Bien sûr qu’elle n’a jamais dû en parler à son mari, de cette folle dépense.
Pétrus remercia et retourna chez son patron reprendre sa besogne. Mais jusqu’à ce qu’il aille le soir au pucier, il était quasiment tout potringue (mal en point). Il ne pensait qu’à la petite fenotte de l’allée de traboule et la nuit il en rêva, le pauvre. Il la voyait franc devant lui, avec sa belle frimousse, son petit nez fripon que semblait rire au sien, ses beaux yeux bleus et ses boucles blondes. De retour à son travail le lendemain matin, dès les huit heures moins le quart il était planté au beau mitan de l’allée et peu d’instants après, il la voyait, venant du quai, traversant l’allée pour remonter la rue Mercière.
Lorsqu’elle passe devant lui :
« Bonjour, mamzelle ! » qu’il lui dit comme ça en levant sa casquette.
« Bonjour, m’sieur ! » qu’elle lui répondit bien gentiment.
Et ce bonjour m’sieur y remit son cœur en place au pauvre mami. Le jour durant il tâcha moyen de savoir qui donc c’était cette jolie fenotte qui, à première vue l’avait tant chaviré.
Il apprit que c’était la Jacqueline, la fille à la mère Richardier qu’était concierge de la maison du quai que joignait celle de Guillaume Rouville. La journée se passa mieux pour lui que celle d’avant et la nuit aussi.
À suivre ...
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