Episode 31 à 35
épisode 35 - La bataille rangée
Conseils de Savoir-Dire selon Fabulgone
Vous avez obtenu un prêt mais n’avez pas encore retrouvé l’équilibre financier.
Votre créancier vous demande : - Penses-tu bientôt me rembourser ?
Répondez-lui : - Je préfère te devoir de l’argent plutôt que t’en faire perdre.
Où Pinocchio se fait rouler dans la farine ce qui provoque une bataille rangée
— Esgourde la grande nouvelle Pinoc’, dans la mer il y a un requin maous costaud que tu dirais une montagne !
— Ça pourrait être celui qui rodait dans le coinsto quand mon paternel a disparu !
— Nous, on gicle à la plage. Tu nous files le train ?
— Ben non, mézigue, je vais à l’école.
— L’école c’est de la roupie de sansonnet et de toute façon, nous ne sommes que des cancres crasses.
— Que va penser l’instit en ne nous voyant pas ?
— Rien à battre, il passe son temps à gongonner alors un peu plus un peu moins !
— Et ma nouvelle maman ?
— T’inquiètes, les mères ne pigent jamais rien à leurs mouflets, assurèrent les petits teigneux.
— J’ai bien envie d’arnoucher la bestiole, mais j’irai après l’école.
— Grande bugne, tu penses pas qu’il va t’attendre, il se sera calté quand tu rallègeras !
— Il faut combien de temps pour se rendre à la plage ? questionna Pinocchio dont la volonté et les bonnes résolutions commençaient à flancher.
— Dans une heure nous serons revenus.
— Banco, filons à toute berzingue, le premier arrivé c'est celui qui gagne, cria le pantin.
Tous les petits tarabates s’égayèrent dans les champs avec leurs livres et leurs cahiers. Pinocchio les devançait, il semblait avoir des ailes. Quand il se retournait, il les voyait haletants, couverts de poussière et la langue sur les godasses, ce qui le faisait bien marrer, inconscient du pétrin dans lequel il était en train de se fourrer.
Dès qu’il arriva sur la plage, il eut beau écarquiller ses quinquets, fifrelette, pas plus de poiscaille que de beurre à la cantine. La mer était d’huile et brillait en surface comme un miroir.
— Où est le requin ? demanda-t-il en se retournant vers ses copains.
— Il est parti déjeuner, répondit l’un d’eux hilare.
— Ou alors il fait la sieste, rifougna un autre en se tenant les côtes.
Tout ceci parut bizarre à Pinocchio et les rires niaiseux lui firent comprendre qu’il s’était fait roulé dans la farine.
— C’est quoi cette arnaque ? s’enquit-il en colère.
— C’est juste pour te faire craquer l’école car tu nous gonfle à bosser comme un malade et toujours être à l’heure. Par ta faute, nous sommes mal vus par le maître, ce sont les gnasses comme tézigue qui nous font de l’ombre et empêchent que nous soyons, nous aussi, considérés. Nous avons notre amour-propre et nous te demandons de te désintéresser de l’école, ou sinon on te cause plus et on te le fera payer à l’occasion.
Pinocchio contrarié par cette diatribe, les toisa.
— Joue pas les fanfarons, tu es seul et nous sommes sept !
— Comme les sept péchés capitaux, lança, ironique, Pinocchio.
— Mais il nous insulte cet enfoiré, dit le plus grand et le plus hardi en s’approchant. Et il lui décocha un coup de poing en pleine poire.
La marionnette répliqua du tac au tac et la baston devint générale. Pinocchio se montrait bien supérieur à ses ennemis qui se couvraient de bleus à chaque coup porté par ses pieds ou ses poings de bois.
Se retirant vers l’arrière, les artoupans défirent leurs ballots de livres. S’en servant de projectiles, abécédaires, grammaires et toutes sortes de manuels scolaires visaient le pantin qui, vif et dégourdi, évitait si bien chaque projectile, que les bouquins finissaient tous dans la mer.
Quant aux poissons, croyant qu’il s’agissait de chicaison, ils se pointaient par bans entiers à la surface de l’eau. Mais après avoir boulotté une page, la recrachaient avec dégoût comme pour dire :
— C’est quoi cette daube, c’est aussi dégueu que les bouteilles de plastoc. Ces humains, sont vraiment des pollueurs sans vergogne. Ils rejoignirent leurs bas-fonds pour aller mâchouiller leur plancton.
La bataille continuait de faire rage sur la plage, lorsqu’un gros crabe se hissa pesamment sur le rivage. Il se mit à crier d’une voix éraillée et comme enrhumée :
Fin de l’épisode, à suivre...,
Que crie le crabe ?
Réponse A – Arrêtez la baston, le Maître d’école alerté par le bruit rallège avec vos parents.
Réponse B – Arrêtez la baston, si vous continuez ça va mal finir, il va y avoir des blessés graves.
Réponse C – Arrêtez la baston, le Requin vous a repéré, il va se pointer et croquer quelques-uns d’entre vous.
Réponse D – Arrêtez la baston, les garde-côtes sont prévenus et vous allez finir au trou pour tapage diurne.
Glossaire des mots nouveaux :
Coinsto – on dit aussi coinsteau : c’est un endroit, le lieu où on se trouve.
Filer le train – c’est suivre avec une intention précise et souvent délictueuse.
Cancre Crasse – Le rajout crasse accentue le côté péjoratif, comme ignorance crasse pour sans volonté de vouloir s’améliorer.
Rien à battre – expression pour dire qu’on s’en moque totalement et c’est ferme et définitif ; c’est comme rien à cirer, à carrer, à péter, à foutre, à cintrer, à faire.
Berzingue (à toute) – s’utilise aussi bien pour la vitesse, que le bruit, mettre le son à toute berzingue, c’est la musique au maximum.
Et toujours vous pouvez consulter le dictionnaire du parler populaire argotique et lyonnais, de plus en plus enrichi qui vous permet de retrouver les mots déjà explicités. Il vous suffit de cliquer sur - Glossaire
épisode 34 - Les mauvais garnements
Conseils de Savoir-Dire selon Fabulgone
Vous avez noué une relation avec la fille de vos rêves.
Elle vous demande : - Préfères-tu une fille belle et sotte ou au physique ingrat et intelligente ?
Répondez-lui : - Le naturel et la fraîcheur supplantent l’éphémère et l’espièglerie vaut dix intellos.
Où Pinocchio se rend à l’école et affronte les quolibets des vrais garnements.
Pinocchio se sentit un peu moins joyeux à l’idée de retrouver la communale.
– Grâce aux études, tu choisiras ton propre turbin, continua la Fée.
La marionnette se mit à gongonner en douce. Son visage se renfrogna.
- Pourquoi ronchonnes-tu entre tes quenottes ? S’impatienta la Fée dont la patience commençait à fondre comme un glaçon sous la canicule.
– Je me disais qu’il était un peu tard pour commencer les cours, rouscailla le pantin. On pourrait attendre la rentrée prochaine ?
– Non monsieur ! Pour s’instructionner, c’est toujours le bon moment.
– Oui mais bon, turbiner et jouer les pue-la-sueur, c’n’est pas vraiment ma tasse de thé.
– Et pourquoi t’est-ce donc ?
– Aller au chagrin, rien que l’idée, ça me file le coup de bambou.
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– Esgourde mon gone. Tous ceux qui bavochent comme tu le fais, survivent en s’adonnant à de misérables larcins et ils finissent presque toujours dans un cul de basse-fosse et plus tard à l’hospice des indigents. Sache que tous les individus sur terre, qu’ils soient friqués ou issus de la plèbe doivent s’occuper et faire quelque chose qui s’appelle travailler. Prends garde à ne pas sombrer dans l’oisiveté, la mère de tous les vices ! C’est une maladie terrible un virus sournois qui guette et s’infiltre dans le corps des petits feignassoux. C’est dès l’enfance que l’on peut s’immuniser, sinon c’est trop tard, elle devient une maladie incurable.
Touché par ces paroles qui le firent flipper, Pinocchio releva la tête en jabillant :
- J’étudierai, je travaillerai, j’ai pigé, je ferai tout ce que tu voudras, car j’en ai marre d’être un pantin de bois, ça ne me branche plus (pantin, bois, branche, voilà le genre d’associations d’idées qui vous classe un scribouillard comme la garenne classe un lapin). Je veux devenir un gamin comme les autres quoi qu’il m’en coûte. Tu me l’as promis, n’est-ce pas ?
– Je te l’ai promis et dorénavant cela dépend de toi.
Le lendemain, Pinocchio déterminé partit pour l’école. Le moins qu’on puisse dire, c’est que son arrivée ne passa pas inaperçue. Quand tous les polissons d’écoliers l’arnouchèrent, les momignards sont cruels, ce fut un éclat de rire général. S’approchant de lui, les uns lui piquèrent son bonnet, d’autres lui tirèrent sa vagnotte par derrière ou lui dessinèrent deux grosses moustaches sous le nez et même certains lui attachèrent une ficelle aux gambettes et aux brandillons pour le faire danser. Imperturbable, Pinocchio ne broncha pas restant impassible, mais il commençait à avoir les boules et ça chauffait dans sa cafetière. Il tenta un compromis en s’adressant à ceux qui l’asticotaient le plus :
- Les mectons faudrait voir à stopper ! Je n’ai pas débarqué dans le coinstot pour être votre souffre-douleur. Je vous respecte, alors respectez-moi.
– Bravo ! Tu jactes comme un livre ! hurlèrent les sales mioches dont les rires redoublaient.
L’un d’eux, parmi les plus tarabates, chercha à lui saisir le pif. Sans succès, car sous la table Pinocchio lui décocha un bon coup de pied dans les tibias.
- Aïe ! Aïe ! Il a les ripatons drôlement durs ! couina le gamin en se frottant la jambe.
– Et ses coudes donc ! ils sont encore plus durs que ses pieds ! ajouta un autre qui venait de se prendre une bourrade dans l’estogom en réponse à ses plaisanteries grossières.
Coup de pied et coup de coude firent leur effet : la marionnette y gagna l’estime et la sympathie de tous les écoliers qui se mirent à l’aimer sincèrement et à lui prodiguer mille signes d’amitié. Même l’instit faisait son éloge tellement il était attentif, studieux, intelligent, toujours le premier à arriver en classe et le dernier à se lever une fois la leçon finie. Son seul talon d’Achille c’était que beaucoup de ses aminches étaient des marque-mal, des bras-neufs qui n’étaient pas des lumières.
Pourtant le maître et la Fée ne manquaient pas de le rencarder sur les risques qu’il encourait. La bonne Fée lui disait :
- Méfie-toi, ces galavards finiront un jour par te détourner du droit chemin et aussi par t’attirer des embiernes.
– Te marpaille pas la comprenette, je ne suis pas un perdreau de l’année et j’ai de la jugeote, répondit le pantin et se touchant le front.
Or, il advint qu’un beau jour, alors qu’il s’approchait de l’école, Pinocchio vit venir vers lui ses poteaux habituels qui lui dirent…
Fin de l’épisode, à suivre...,
Que vont proposer ses amis ?
Réponse A – Ne viens pas à l’école, Mangiafoco et son théâtre de marionnettes est au village, il t’attend et souhaite te taper la bise.
Réponse B – Les polissons vont prétexter que le maître d’école est en réunion pédagogique et qu’ils peuvent aller jouer à la plage.
Réponse C – Ils vont lui dire qu’ils ont vu un requin géant proche de la plage, peut-être celui qui a pris son père.
Réponse D – Ils viennent le féliciter et l’accompagner à l’école pour recevoir son premier certificat d’études.
Glossaire des mots nouveaux :
Rouscailler – viens du vieux verbe rousser qui signifiait protester et du suffixe caille souvent utilisé en argot comme poiscaille pour poisson.
Turbin turbineur et turbiner – évoquent le travail manuel pénible ;
Pue-la-sueur – métaphore, ouvrier, tâcheron qui transpire dans l’exercice de son métier.
Chagrin, aller au chagrin – expression récente 1977 pour aller au travail, le chagrin.
Esgourde, esgourdrer – fin XVIIIe c’est l’oreille et écouter.
Bavocher – parler, radoter créé par San-Antonio.
Flipper – à l’origine c’est déprimer sous l’effet de la drogue en période de sevrage et maintenant s’emploie aussi pour avoir la tremblote, se sentir mal sans liaison avec la drogue.
Aminche – fin XIXe déformation de ami.
Marpailler – en parler lyonnais, c’est à la fois abimer, écraser, souiller.
Comprenette – en parler lyonnais c’est l’intelligence la réflexion et si on se marpaille la comprenette, c’est qu’on se fait du mal à trop utiliser son intelligence et se faire des idées négatives.
Pote, poteau, potot – désigne un ami et, un poteau, c’est aussi une grosse cuisse, une grosse jambe, un synonyme de jambonneau.
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épisode 33 - La promesse
Conseils de Savoir-Dire selon Fabulgone
Au musée, vous vous éternisez devant la Vénus de Milo. Un guide s’approche :
Vous êtes bien admiratif ?
Répondez-lui : - Les bras m’en tombent.
Où Pinocchio promet de s’améliorer pour devenir un véritable enfant.
Relevant son cabochon pour remercier sa bienfaitrice, Pinocchio s’interloqua manquant de se dévisser le trognon.
– Mais, mais, mais… chevrota-il, vous ressemblez à ! Oui, oui : même quinquets, même tignasse bleu-nuit comme elle ! Vous êtes ma chère petite Fée ! C’est bien Toi ?
Il se jeta à terre enserrant de ses bras les genoux de la gisquette. Au début elle prétendit que non, mais se voyant découverte, elle ne souhaita pas prolonger le calvaire du polisson.
– Sacré marionnette, comment as-tu fait pour me reconnaître ?
– C’est parce que je t’aime d’une immense tendresse.
– Tu te rends compte que je tu m’as quittée alors que je n’étais qu’une momignarde et te voilà en face d’une adulte qui pourrait être ta maternelle.
– M’en fiche, c’est bonnard ! Au lieu de t’appeler petite sœur, je t’appellerai maman. J’avais vraiment envie d’avoir une maman comme tous les autres gones. Mais au fait, comme t’es-tu défendue pour grandir si vite ?
– C’est un secret.
– Crache ce secret, je voudrais moi-aussi grandir, je n’bouge pas en hauteur sous la toise.
– Normal, les marionnettes ne grandissent jamais, elles naissent marionnettes, vivent marionnettes et meurent marionnettes.
– J’en ai ma claque, d’être un pantin je voudrais être humain.
– Pour cela, il faut le mériter.
– Banco ! Que dois-je faire pour y arriver.
– Fastoche, il te faut consentir à être un gone bien artet et démenet.
– C’est ce que je ne suis pas ?
–Ben oui, un bon gone est obéissant et toi au contraire…
– Je n’obéis jamais.
– Un bon gone aime étudier et travailler et toi au contraire…
– Je flâne et vagabonde à longueur de temps.
–Un bon gone dit toujours la vérité…
– Et moi toujours je mens et fabule.
–Un bon gone ne rechigne pas à aller à l’école.
– En fait c’est que l’école me rend patraque, enfin c’est ce que je crois, mais maintenant je veux changer.
– Tu me le promets ?
– Juré, craché, croix de bois croix de fer, si je n’joue pas le jeu que je reste pantin toute ma vie. Je veux devenir un gamin bien élevé et être la fierté de mon paternel. Mais au fait où est-il à présent ?
– Je l’ignore.
– Crois-tu que j’aurai un jour le bonheur de le revoir et de le couvrir de bisous ?
– Je pense que oui, et même, j’en suis sûre.
La réponse de la Fée Bleue rendit Pinocchio si jouasse qu’il prit les mains de la Fée et les embrassa avec ferveur. Puis levant vers elle des mirettes embuées par l’amour, il jabilla :
– Comme je suis content que tu ne sois pas crevognée en ayant dépoté ton géranium. Si tu savais comme j’ai souffert en lisant cette affreuse pancarte « ci-gît », j’étais tout détrancané.
– Je sais et c’est pourquoi je t’ai pardonné en comprenant que tu avais bon cœur, que je pouvais espérer de toi pour que tu retrouves le droit chemin même si tu es toujours polisson avec de mauvaises habitudes. Je suis venu te chercher ici et serai ta maman de substitution.
– Youpi, c’est formidable dit Pinocchio en sautant de joie.
– Mais tu devras m’obéir et faire ce que je te demande.
– Bien sûr, bien sûr, bien sûr !
– Bon. Alors dès demain, tu vas à l’école.
Entendant ces mots, brusquement Pinocchio…
Fin de l’épisode, à suivre...,
Que va faire Pinocchio ?
Réponse A – Il va tergiverser, marchander et essayer de ne pas aller à l’école.
Réponse B – Il va prétexter qu’il n’a ni trousse ni abécédaire et qu’il doit d’abord retourner à son village.
Réponse C – Il va demander de l’aide pour partir à la recherche de son paternel qui est sa première priorité.
Réponse D – Il va détourner l’attention de la Fée pour aller se planquer dans une maison voisine.
Glossaire des mots nouveaux :
Se dévisser le trognon ou le coco – forme pronominale du verbe étrangler quelqu’un et qui correspond donc à avaler de travers, s’étrangler.
Se défendre – en langage argotique, se défendre, c’est réaliser avec habileté quelque chose de très particulier, mais dans une autre acception, c’est se livrer à la prostitution !!
Patraque – Mot d’argot entré dans le dictionnaire usuel et qui signifie être en mauvaise forme physique ; une patraque était une vieille horloge ou une montre qui fonctionnait mal.
Être détrancané – En parler lyonnais, c’est avoir le cerveau qui est tout embrouillé ; c’est un mot qui vient de la canuserie ou trancaner était une action pour éviter que les fils de soie ne s’embrouillent, tirent et se cassent.
Jouasse, joice, joisse et même joyce chez San Antonio – quatre mots pour être joyeux, content et c’est un mélange de joie et de jouir.
Et toujours vous pouvez consulter le dictionnaire du parler populaire argotique et lyonnais, de plus en plus enrichi qui vous permet de retrouver les mots déjà explicités. Il vous suffit de cliquer sur - Glossaire
épisode 32 - Pinocchio fait la manche
Conseils de Savoir-Dire selon Fabulgone
Un carriériste au bureau obtient une promotion qui vous était destinée ; il vous interpelle :
Je ne t’ai pas vu à mon arrosage ?
Répondez-lui : - Désolé ! Je n’aime pas les fêtes tristes.
Où Pinocchio affamé et assoiffé refuse de travailler.
Pinocchio arnoucha un gus arrivant à sa hauteur. Pour sûr c’était un vrai pue-la-sueur qui haletait en tirant à grand peine deux charrettes de charbon. Il avait toutefois la mine avenante et le pantin l’interpella d’une voix mielleuse en baissant ses quinquets.
– Si ce serait un effet de votre bonté, pourriez-vous me faire la charité d’un petit sou, j’ai les crocs.
– C’est quatre sous que je te donnerai, rebriqua le charbonnier, s’essuyant le front avec un tire-jus quelque peu maculé de suie. Mais avant, il te faudra me prêter la main pour tirer les charrettes jusque chez moi.
Prenant un air offensé, la marionnette répliqua :
– Sachez mon brave que je ne suis pas une bête de somme et que je n’ai jamais été attelé à une charrette !
– C’est bonnard pour tézigue de jouer les bras-neufs, dit en riant le charbonnier, si tu as vraiment la dalle, commence donc par briffer deux belles tranches de ton orgueil et fais gaffe à ne pas choper une indigestion !
Deux broquilles plus tard, c’est un maçon qui se pointa, portant sur son épaule un sac de chaux.
– Mon bon monsieur, feriez-vous l’aumône d’un sou à un galapiat bien propre sur lui et qui baille à s’en décrocher le clapoir tellement il a la fringale ! couina le pantin.
– Bien volontiers, jacta le maçon, je te donnerai même cinq sous si tu m’aides à porter ce sac.
– Mais la chaux, c’est plutôt lourdingue, fit remarquer Pinocchio, et je ne veux pas me fatiguer.
– Si tu veux ne pas te fatiguer, gamin, alors continue de jouer à bailler, grand bien te fasse.
Et c’est ainsi qu’au bout d’une demi-plombe, une bonne vingtaine de mectons à qui la marionnette faisait la manche lui répondirent.
– Tu devrais avoir honte ! Au lieu de traînasser dans la rue, cherche donc un turbin et apprends à gagner ta vie !
Finalement déboula une gisquette sympa qui portait deux cruches pleines d’eau.
– Bonne Dame, accepteriez-vous que je me rince le corgnolon avec une gorgée d’eau de l’une de vos cruches ? Quémanda Pinocchio que son gosier était plus sec et brulant qu’une dune en plein désert.
– Bois, mon gone ! dit la minette en posant son fardeau à terre.
Pinocchio s’enquilla la flotte comme une éponge, claqua de la menteuse et marmonna.
– Maintenant je n’ai plus soif, mais comment faire pour ne plus avoir le bide qui gargouille.
La gentille fenotte, esgourdant ces paroles s’empressa de dire.
– Si tu m’aides et portes une de ses cruches, je te donnerai un bon morceau de pain quand nous serons arrivés à ma cambuse.
– Pinocchio zieuta la grande cruche, sans répondre.
– Et avec le brifton, je te servirai un plat de chou-fleur à la vinaigrette, ajouta le prix de Diane.
– Pinocchio lorgna à nouveau la cruche sans se décider.
– Et après le chou-fleur, tu auras droit à une dragée au rosolio (le rosolio est de la liqueur de rose, une spécialité italienne). La perspective d’une telle friandise fit flancher la détermination du pantin de ne pas suer le burnous. Il se fit violence et jacta.
– D’accord je porterai l’une de ces cruches jusque chez vous.
Elle était lourde et ne pouvant la tenir à bout de bras, il la mit sur son cabochon. Une fois arrivés, la gentille gosseline fit asseoir Pinocchio à une petite table qui était déjà mise et elle disposa devant lui le brignolet, le chou-fleur, et la dragée à la liqueur de rose. Pinocchio ne boulotta pas, il bâfra comme un goinfre. Il faut dire qu’il avait l’estogome plus vide que l’escarcelle d’un michton qui venait de payer ses impôts.
Il releva alors son cabochon pour remercier sa bienfaitrice, mais...
Fin de l’épisode, à suivre...
Qu’est-ce que zieuta-t-il ?
Réponse A – Pinocchio vient de reconnaître la sorcière qui a accueilli Hansel et Gretel ; il tremble à l’idée de passer à la casserole.
Réponse B – Il vient de reconnaître la marâtre, mère de Blanche Neige, et se demande si elle n’a pas empoisonné la dragée fourrée à la liqueur de rose.
Réponse C – Il se croît victime d’hallucination car c’est la Fée Bleue qui se trouve en face de lui.
Réponse D – Il en est sûr, sa bienfaitrice n’est autre que Maléfique et il va à son tour tomber en léthargie pour cent ans.
Glossaire des mots nouveaux :
Pue-la-sueur – ouvrier, tâcheron, un mot composé qui reflète le travail et ses conséquences physiologiques que les affranchis du milieu exècrent.
Tire-jus – mouchoir, une métaphore implicite utilisée depuis 1805 et au temps de Vidocq en 1836 on employait aussi le verbe tirjuter pour se moucher.
Bras-neuf – En lyonnais c’est un fainéant, une image bien parlante pour celui qui rechigne à travailler.
Brifton – on dit aussi bricheton ou brignolet – c’est le pain et aussi un casse-croûte et briffer a donné manger, casser la croûte.
Et toujours si vous bloquez sur un mot populaire, vous pouvez consulter le dictionnaire du parler populaire argotique et lyonnais, de plus en plus enrichi qui vous permet de retrouver les mots déjà explicités. Il vous suffit de cliquer sur - Glossaire
épisode 31 - L'île des Abeilles Industrieuses
Conseils de Savoir-Dire selon Fabulgone
Un copain vous interpelle : - Je te trouve bien empressé auprès de ma fiancée
Répondez-lui : - Ah non ! Il n’y a jamais rien eu entre nous, pas même un vêtement.
Où Pinocchio questionne un dauphin avant de rejoindre un curieux village.
Pinocchio nagea toute la nuit dans l’espoir de sauver son paternel, il affronta le tonnerre, les trombes d’eau et même la grêle, sans compter les éclairs, jusqu’à tant que Jupiter aille se faire entendre ailleurs. Il entrevit au loin une longue bande de terre et redoubla d’efforts en remuant ses agotiaux, mais rien à chiquer, le flux et le reflux le ballotaient comme une brindille, lorsqu’une vague tsunamesque, le catapulta sans ménagement sur la plage de sable.
Il numérota ses abattis et constatant qu’il ne lui manquait ni brandillon ni fumeron, il soupira.
– Ouf ! Cette fois encore, je l’ai échappé belle !
À cha peu le ciel redevint serein, le soleil brilla de nouveau et la mer se calma comme quand elle danse le long des golfes clairs. Le pantin se déloqua pour faire sécher ses fringues puis il écarquilla ses quinquets, zieutant au loin les flots dans l’espoir d’y repérer la coque de noix, en vain. Un peu inquiet, il songeait :
– Si au moins je savais comment se nomme cette ile ! Est-ce que crèchent ici des gus sympas qui n’ont pas pour habitude de pendouiller des momignards aux branches des arbres ? Est-ce une ile déserte ? Qui peut m’affranchir ?
Il arnoucha alors un gros poisson assez proche de la rive, qui vaquait tranquillos à ses occupations. Il le héla.
– Ohé ! Monsieur le poisson, puis-je vous dire un mot ?
– Même deux, répondit le dauphin, car c’était un dauphin fort aimable comme on en trouve peu dans ce coin du globe.
– Si ce serait un effet de votre bonté, pouvez-vous me dire si, dans ce coinsto, il y a des patelins où l’on puisse becqueter sans courir le risque de passer à la casserole ?
– Mais c’est bien sûr, l’informa le mammifère marin du genre cétacé, tu en trouveras un à proximité.
– Comment on y va ?
– Fastoche, tu prends le ruban, là sur ta gauche, et tu crapahute tout droit ; Tu ne peux pas te berlurer.
– Merci, mais dites-moi, vous qui passez vos journées à sillonner l’océan, vous n’auriez pas croisé une chaloupe avec mon papa dedans.
– Qui donc est ton dabuche ?
– C’est le meilleur paternel du monde alors que je ne suis qu’un artoupan et que je ne le mérite pas.
– Sans vouloir plomber l’ambiance, avec la tempête de cette nuit la chaloupe a dû sombrer.
– Et mon papa ?
– À c’t’heure, il a sans doute été gobé par le redoutable requin, pire que le kraken qui sème la terreur dans les eaux autour de l’ile.
– Il est si maous-costaud que ça ? S’enquit la marionnette terrorisée, qui serrait les miches et claquait des mandibules.
– Pour sûr, rebriqua le dauphin. Il est plus grand que King-Kong et dans sa gueule, il peut engloutir une locomotive, le tender et deux wagons.
– Mamma mia ! Gémit Pinocchio en version originale (puisqu’il est italien).
Il se reloqua à toute berzingue, remercia le cétacé, et trissa en se retournant à chaque bruit, de crainte d’être poursuivi par le monstre. Il déboula dans un petit bled où le panneau précisait : « Village des Abeilles Industrieuses. »
Les rues étaient sillonnées de gens qui courataient en tous sens et qui avaient tous une occupation. T’avais beau arregarder de partout, tu ne voyais ni oisif, ni vagabond.
– J’ai tout pigé, se dit aussi sec ce feignassou de Pinocchio, ce patelin n’est pas pour moi, je n’suis pas venu icigo pour me faire suer le burnous ! Mais en même temps, il avait la fringale car depuis vingt-quatre heures, il n’avait rien tortoré. Dilemme !
Soit il lui fallait trouver du boulot, soit il devait mendier quelques espinchaux ou un croûton de pain. Seulement mendier lui faisait honte car son papa lui avait enseigné que seuls les vieillards et les infirmes, ceux qui étaient trop âgés ou malades pour travailler de leurs mains pouvaient demander l’aumône. Les autres, s’ils avaient la fringale devaient bosser ou alors tant pis pour eux.
Il en était là de ses réflexions quand il vit passer dans la rue...
Fin de l’épisode, à suivre...
Qu’est-ce que zieuta-t-il ?
Réponse A – Un homme sandwich (un comble) qui portait un panneau, proposant une activité d’essayeur de matelas chez Mérinos, contre un bon repas chaud.
Réponse B – Deux représentants de la maréchaussée qui traquaient les inactifs pour leur faire repaver les rues.
Réponse C – Un charbonnier poussant une charrette pleine de sacs de boulets d’anthracite.
Réponse D – Une jeune femme distribuant des prospectus, offrant un double cheeseburger frites et un coca au McDo du coin.
Glossaire des mots nouveaux :
Fumerons – ce sont les jambes généralement d’un homme. Pour une femme on dira fuseaux ou gambettes.
Débouler – arriver subitement, c’est aussi dans cet esprit que déboulement c’est un accouchement.
Arregarder – En lyonnais c’est regarder fixement et attentivement avec une connotation d’étonnement, le rajout du préfixe ar est un classique pour accentuer une action.
Espinchaux – En parler lyonnais il s’agit, d’argent, mais de menue monnaie ; c’est un détournement comique du vieux français espinchau qui signifiait épingle et une épingle c’est de peu de valeur.
Et toujours vous pouvez consulter le dictionnaire du parler populaire argotique et lyonnais, de plus en plus enrichi qui vous permet de retrouver les mots déjà explicités. Il vous suffit de cliquer sur - Glossaire
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